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Ce blog est totalement dédié pour débattre de l'avenir de notre patrimoine commun. On espère que ce serait un lieu de rencontre entre les membres de la communauté de l'eau en Tunisie, permettant de confronter différents point de vue sur la problématique de l'eau dans notre pays.
"Conscient que par nos pensées nous sommes seul maître de notre destinée"


vendredi 27 avril 2018

LA REGULATION POUR UN DROIT D’ACCES A L’EAU DURABLE ET EQUITABLE


L’eau est au centre des enjeux économiques, sociaux, environnementaux et territoriaux  complexes. Bien qu’elle soit la base même d’un développement viable, équitable et acceptable de notre société, elle est aujourd’hui sujette à des tensions et plus que jamais fragilisée. On avance souvent que notre pays manque naturellement d’eau, quoique tout observateur averti constatera que les ressources disponibles sont mal utilisées. Il constatera également que la responsabilité de tous les acteurs est véritablement engagée dans le gaspillage de l’eau. Les pertes dans les réseaux de distribution, la gestion de l’eau à la parcelle, les choix culturaux, les rejets non contrôlés, la non récupération de l’eau pluviale dans les zones urbaines, la surexploitation des nappes sont autant d’exemples de cette mauvaise utilisation. Le gaspillage de l’eau conduit inévitablement au gaspillage d’autres ressources économiques. Il existe en l'occurrence un lien entre le gaspillage et l’adoption d’une stratégie de stockage sous-optimale. En plus, le gaspillage dans un usage particulier prive d’autres usages alternatifs de quantités qui auront pu servir à accroitre le bien-être social. L’amélioration de l’efficience de l’usage, c’est à dire la recherche du meilleur usage possible des ressources, est cependant une condition sine qua non de préservation et un levier pour une utilisation durable et une répartition équitable des ressources.

Force est de constater qu’à l’heure actuelle nous faisons face à un enjeu vital notoire. Maintenant, la question est de savoir comment l’effort national peut-il garantir le droit fondamental d’accès à l’eau et au service de l’assainissement pour tous les citoyens ? Comment se prémunir contre tout risque d’exclusion et assurer une répartition juste de l’eau et des opportunités ? Comment protéger le droit des « sans voix », les générations futures et les écosystèmes, en s’assurant que les choix sociétaux actuels n’altèrent pas leur bien-être et leur résilience.

Ce questionnement, suscité par la situation inquiétante de nos ressources et la perspective de leur évolution, témoigne que les actions passées et les mécanismes en vigueur régissant leur utilisant n’ont pas conduit à leur développement durable. C’est se leurrer que de croire que nous pouvons continuer sans réexaminer notre façon de penser l’utilisation de ces ressources; si bien qu’il est nécessaire de reconsidérer notre rapport à ce patrimoine, et revoir le système de valeurs sous-jacent, afin d’établir des  règles de gestion plus appropriées.

Le système de valeurs définissant le nouveau paradigme de gouvernance et de gestion prend sa source dans la loi fondamentale du pays. L’inclusion du droit universel à l’eau dans la nouvelle constitution oriente désormais la politique publique de l’eau, définit les principes de gestion et guide la conduite des acteurs en précisant les droits et les responsabilités de chacun[1]. La jouissance de ce droit devrait être dès lors l’objectif principal de la politique nationale de l’eau dont la stratégie est axée sur le développement durable des ressources et l’engagement effectif de tous les acteurs dans sa préservation. Celle ci se traduit concrètement par un usage efficient. Il incombe par conséquent à chaque acteur l’obligation de rendre des comptes sur sa gestion de la ressource.

La réalisation du droit universel et durable à l’eau requiert non seulement une ressource disponible durablement, mais également une infrastructure fiable et un service public viable. La responsabilité de chaque acteur et l’efficience des usages et des services, se placent au cœur du nouveau dispositif de gestion. Encore faut-il concevoir les mécanismes qui amènent le système de l’utilisation et de la gestion des eaux à fonctionner conformément à ces principes. 

C’est justement à ce stade que la fonction de régulation prend toute son importance. Cette fonction incombe naturellement à l’Etat qui est le dépositaire légitime de l’intérêt général. La régulation est en effet l’ensemble d’outils et de mécanismes mis en place par le pouvoir public pour veiller sur le bon fonctionnement du système de gestion et de l’utilisation des ressources et au respect des règles et principes prédéfinis. 

Le constat établi plus haut s’explique entre autre soit par une défaillance du régulateur soit par un régulateur qui, en n’agissant qu’imparfaitement avec des outils de régulation peu adéquats, ne s’est pas donné les moyens pour assurer le bon fonctionnement du système. Il met en évidence également les limites du mode direct de régulation utilisés jusqu’à lors et incite à examiner des arrangements institutionnels plus adéquats.

Réformer le mode direct de régulation  par la mise en place d’un organe public indépendant qui se charger spécifiquement de cette fonction, améliore la gestion gouvernementale des ressources en eau. L’amélioration de l’efficacité de la gestion résulte en effet de la séparation des fonctions étatiques de l’élaboration de politiques, de la régulation et de la fourniture du service public, en des institutions distinctes.

Ce nouveau régulateur, indépendant et intègre, est chargé de veiller sur l’intérêt général qui se définit par la pérennité du droit d’accès à l’eau. Il serait aussi responsable de la conception et de la mise en application d’un modèle de régulation incitatif basé sur la performance, la transparence, la participation et la redevabilité.  

Le régulateur, cet élément essentiel de la nouvelle gouvernance de l’eau, serait appelé à jouer différents rôles. D’abord, entre les usagers et les opérateurs du service de l’eau, dans le sens où cet organe de régulation supervise la qualité des services rendus, le respect des normes, la tarification et la performance des opérateurs et en informe les citoyens. Cet organe joue ensuite le rôle d’interface entre le gouvernement et les opérateurs dans le sens où il aide ces derniers à optimiser les services rendus aux citoyens, atteste de leur progrès et rationalise la gestion gouvernementale des services publics. 



[1] Pour une lecture croisée de l’article 44 de constitution du Janvier 2014 relatif au droit à l’eau, se référer à La gouvernance de l’eau dans la nouvelle constitution tunisienne sur le blog L’avenir de l’eau en Tunisie : https://initiativeeau.blogspot.com/2014_05_04_archive.html.

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